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Communiqué de presse - Mais que reproche-t-on à l’université de Nanterre ?
8 novembre 2021
Depuis plus d’une semaine l’Université Paris Nanterre connaît une occupation d’une partie de ses locaux administratifs, des rassemblements réguliers ont lieu sur son campus principal, les réseaux sociaux sont intensément animés à son sujet, des motions de tous ordres sont diffusées, des acteurs politiques interviennent.
Celui-ci est-il dirigé vers cette université parce qu’elle est une des plus sous-encadrée à l’échelle nationale, avec un ratio de 2,7 enseignants titulaires pour 100 étudiants et un sous-encadrement plus fort encore en termes de personnels administratifs ? Parce que depuis plusieurs années elle n’est plus en mesure que de renouveler un poste sur trois parmi son personnel enseignant et contrainte de faire s’accroître sans cesse la part des enseignements assurés par des personnels contractuels ou vacataires ? Et que, dans ces conditions, cette université, après des mois « Covid » qui ont tant éprouvé ses personnels et ses étudiants, tente de revenir à une situation plus normale, d’assumer ses missions de service public malgré son manque de moyens et s’est donné comme priorité de réduire la précarité étudiante révélée et aggravée par la crise sanitaire ? Est-ce pour ces raisons qu’elle doit être la plus vigoureusement accusée d’être l’une des plus sélectives et exclusives de France ?
Ou bien ce reproche est-il adressé à cette université parce que, depuis des semaines, elle est parvenue à résoudre près de 300 situations d’étudiants sans affectation dans le cadre d’échanges constants avec ses composantes, responsables de formation, commissions pédagogiques et de rencontres avec les organisations étudiantes ? Ces accueils, privilégiant des situations selon des critères clairs, se faisant toujours au-delà de ses capacités d’accueil et dans des locaux déjà surchargés. Ce qui a été privilégié par l’université est la situation des étudiantes et étudiants, de la licence au master ; ce qui a été engagé, pour résoudre les situations ne trouvant pas de solutions locales, c’est un travail intense avec les rectorats pour proposer des solutions, et aussi l’appel à la solidarité d’autres établissements de la région. Ces solutions trouvées et proposées sont refusées sur le seul principe qu’elles ne sont pas « à Nanterre ». Est-ce donc une si mauvaise chose que de tenter de résoudre au moins mal toutes les situations ?
A moins que les reproches faits à l’université de Nanterre ne portent sur ses valeurs et principes de démocratie et de collégialité ? On reprocherait alors à la présidence de l’université de ne pas inscrire de manière autoritaire, contre l’avis des commissions et des formations, des étudiants sans affectation. Si c’était cela, le paradoxe serait étonnant : de réforme en réforme de l’enseignement supérieur, le pouvoir des présidences d’université est sans cesse renforcé, les mêmes qui contestent cette évolution en seraient soudain devenus les défenseurs ? Ce n’est pas le principe que veut mettre en œuvre Nanterre, il est au contraire de considérer que la personne qui assume la présidence de l’établissement est une ou un élu parmi ses pairs, et que les choix doivent être collectifs, respectueux de toutes les diversités, appuyés sur des débats dans ses instances et conformes à l’intérêt général d’un service public.
Peut-être aussi d’autres éléments sont-ils à prendre en compte. L’un serait que l’université de Nanterre, de par son histoire, est un symbole politique fort ? Ou bien simplement que la configuration de son campus principal, ouvert sur la ville et sur son territoire, concentré essentiellement en un seul lieu, en fait un espace facile à pénétrer, à parcourir, à investir ? Le reproche serait-il alors celui de ce choix majeur d’ouverture sur l’espace environnant, reflet du choix assumé d’ouverture sur la société ?
Quelles que soient les bonnes réponses aux questions posées ici, il est sans doute important d’entendre aussi la communauté de l’université qui aspire à l’apaisement, ne souhaite pas être instrumentalisée, contribue par ses efforts à accueillir au mieux les étudiants mais ne peut le faire au détriment ni des conditions d’étude et de travail ni de ses principes démocratiques. Les enjeux à venir pour le service public d’enseignement supérieur sont majeurs, les vrais sujets sont ceux de l’égalité et de l’équité, ils sont nationaux. Si l’on veut pouvoir tenir les débats essentiels à leur sujet, défendre des principes face à des évolutions qui inquiètent, il est temps de laisser fonctionner l’université de Nanterre, de renouer et renforcer le dialogue, et, bien sûr, de ne pas nuire à la résolution des situations d’étudiants pour lesquels il faut chercher des solutions d’affectation conformes à leurs parcours d’étude.
Mis à jour le 11 juillet 2022